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enfin, le front dans les mains. Il ne se contentait plus d’écouter, il pensait.

Le bruit de ces pas, à n’importe quel moment, ne différait pas de celui qu’on entend fréquemment dans un hôtel ; et pourtant, considéré dans son ensemble, il présentait un caractère particulièrement étrange. Il n’y avait aucun autre bruit. La maison était toujours très silencieuse, car les quelques hôtes familiers se rendaient directement à leurs appartements, et les domestiques bien stylés avaient l’ordre de rester invisibles, jusqu’au moment où l’on réclamerait leurs services. Il était impossible de concevoir aucun endroit où il y eût moins de raison de suspecter quoi que ce soit d’irrégulier. Mais ces pas étaient si étranges qu’il eût été impossible de se prononcer sur leur régularité. Du bout des doigts, le Père Brown suivit leur rythme, sur le rebord de la table, comme quelqu’un qui essaierait de reproduire une mélodie au piano.

D’abord venait une série précipitée de petits pas rapides, tels que ceux d’un léger marcheur engagé dans une course au pas. À un certain moment, ils s’arrêtaient net, pour faire place à une marche lente et cadencée occupant le même intervalle de temps, mais comptant quatre fois moins de pas. À l’instant où le bruit de la dernière enjambée s’éteignait dans le corridor, les pieds rapides et légers reprenaient leur course, pour faire bientôt place aux chocs sourds causés par les grands pas. Ces deux bruits étaient certainement provoqués par la même paire de bottes, d’abord parce que (comme nous l’avons