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du docteur Simon, je persiste à affirmer que Becker n’était que partiellement présent. Regardez plutôt ! dit-il, en indiquant du doigt la masse noire du mystérieux cadavre, vous n’avez jamais vu cet homme-là. Mais avez-vous jamais vu celui-ci ?

Il écarta rapidement la tête jaune de l’inconnu et mit, à sa place, la tête couverte de cheveux blancs. Et soudain, devant eux, complet, unifié, évident, surgit Julius K. Brayne.

— Le meurtrier, continua Brown avec calme, trancha la tête de son ennemi et jeta le sabre au-dessus du mur. Mais il était trop malin pour ne jeter que le sabre. Il jeta également la tête. Puis, il lui suffit d’adapter une autre tête au corps, et, comme il insista pour garder l’enquête secrète, vous vous êtes tous imaginé avoir affaire à un autre individu.

— Adapter une autre tête ! dit O’Brien stupéfait. Quelle autre tête ? Les têtes ne poussent pas sur les buissons d’un jardin ?

— Non, dit le Père Brown, d’une voix rauque, en fixant du regard la pointe de ses bottines. Elles ne poussent qu’à un endroit. Elles poussent dans le panier de la guillotine, à côté duquel le chef de la police, Aristide Valentin, se tenait quelques heures avant le crime. Oh, mes amis, écoutez-moi un instant, avant de m’écharper. Valentin est un honnête homme, si l’on peut considérer comme honnête la folie qui s’empare d’un fanatique défendant une cause discutable. Mais n’avez-vous jamais vu passer l’éclair de la folie dans son œil gris et froid ? Il était prêt à