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mystérieux paré des vives couleurs matinales, toute la tragique futilité qui caractérisait jadis sa contenance, l’avait quitté. Il avait tout lieu d’être heureux. Lord Galloway était un gentleman, et lui avait présenté ses excuses. Lady Margaret était mieux qu’une lady, une femme pour le moins, et lui avait sans doute permis d’espérer mieux que des excuses, tandis qu’ils se promenaient ensemble, parmi les parterres fleuris, avant le déjeuner. Tous les invités avaient le cœur plus léger car, quoique le mystère ne fût pas éclairci, les soupçons ne se portaient plus sur aucun d’eux, mais sur ce millionnaire étranger, qu’ils connaissaient à peine et qui fuyait en ce moment vers Paris. Le diable avait été expulsé de la maison — il s’en était expulsé lui-même.

L’énigme n’en restait pas moins insoluble, et lorsque O’Brien s’assit sur un banc, à côté du docteur Simon, ce dernier tenta de nouveau de l’éclaircir. Il ne parvint pas à faire causer O’Brien, qui songeait, pour l’instant, à des choses plus plaisantes.

— Je ne puis dire que cette affaire m’intéresse beaucoup, avoua franchement l’Irlandais, surtout qu’elle semble assez simple maintenant. Brayne apparemment avait quelque raison de haïr cet étranger. Il l’attira dans le jardin et le tua avec mon sabre. Puis il se sauva vers la ville en jetant le sabre dans sa fuite. À propos, Ivan me dit que le mort avait un dollar dans une de ses poches. C’était donc un compatriote de Brayne, ce qui semble confirmer nos suppositions. Je ne vois aucune difficulté dans tout cela.