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corps ; celui qui avait tranché la gorge, avait aussi coupé le cou. Valentin lui-même eut un léger mouvement de recul.

— Il doit être fort comme un gorille, murmura-t-il.

Non sans un frisson, quoiqu’il fût habitué aux autopsies, le docteur Simon prit la tête en main. Le cou et la mâchoire étaient légèrement tailladés, mais le visage était à peu près intact. C’était une lourde face, au teint jaune, à la fois maigre et boursouflée, avec un nez d’aigle et des lèvres épaisses — le masque d’un méchant empereur romain, avec, peut-être, quelques traits d’un empereur chinois. Tous les assistants semblaient plongés dans la plus frigide ignorance. Ils ne pouvaient rien remarquer d’autre, mais, en levant le corps, ils avaient vu, en dessous, la tache blanche d’un devant de chemise, souillé de sang. Comme le fit remarquer le docteur Simon, si l’homme n’était pas des leurs, il aurait pu tenter de se joindre à eux, car il était en habit.

Valentin s’agenouilla et examina, avec la plus profonde attention, l’herbe et le sol, dans un rayon de vingt mètres autour du cadavre, en quoi il fut aidé, moins adroitement, par le docteur et tout à fait vaguement par le lord anglais. Ils ne trouvèrent rien que quelques baguettes brisées ou coupées en petits fragments ; Valentin les examina un instant, puis les rejeta.

— Des baguettes, dit-il gravement, des baguettes et un inconnu, la tête coupée ; c’est tout ce qu’il y a sur cette pelouse.