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— Où un sage cache-t-il une feuille ? Dans la forêt.

L’autre ne répondit pas.

— S’il n’y avait pas de forêt, il en créerait une. Et s’il voulait cacher une feuille morte, il créerait une forêt morte.

Toujours pas de réponse. Le prêtre ajouta avec plus de douceur encore et de calme :

— Et s’il avait à cacher un cadavre, il créerait un champ de cadavres pour égarer les recherches.

Flambeau bondit en avant, en frappant le sol du pied, comme si son impatience voulait dévorer l’espace aussi bien que le temps. Mais Brown continua, comme s’il n’avait pas été interrompu :

— Sir Arthur Saint-Clare, comme je te l’ai déjà dit, lisait sa Bible. C’est là ce qui le perdit. Quand les hommes comprendront-ils qu’il est parfaitement inutile qu’ils lisent leur Bible, s’ils ne lisent pas aussi la Bible des autres ? Un imprimeur lit la Bible, et y trouve des fautes d’impression. Un Mormon lit la Bible et y trouve la polygamie ; un scientiste chrétien lit la Bible et y trouve que nous n’avons ni bras ni jambes. Saint-Clare était un vieux soldat anglo-indien ; il était aussi protestant. Représente-toi ce que cela peut signifier, et, pour l’amour de Dieu, vois les choses en face. Cela peut indiquer un homme d’une grande puissance physique, vivant sous un soleil tropical, au milieu d’une société orientale, et s’imbibant, sans choix ni guide, de l’atmosphère d’un