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cupe une place importante dans le journal du soldat. Il y paraît comme un homme maigre, aux cheveux bruns, répondant au nom de Murray, un Irlandais du Nord et un puritain. Le contraste entre l’austérité de ce protestant d’Ulster et la jovialité du colonel Clancy y est l’objet d’innombrables plaisanteries. On y trouve aussi certaines remarques relatives aux vêtements de couleurs voyantes portés par le Vautour.

Mais tous ces bavardages cessent brusquement comme au son de la trompette. Derrière le camp anglais, et presque parallèlement à la rivière, courait une des rares grand’routes de la région. À l’Ouest, cette route se recourbait pour descendre dans la vallée, qu’elle traversait sur le pont mentionné plus haut. À l’Est, elle s’éloignait vers les landes désertes. C’est dans cette direction que, deux milles plus loin, se trouvait campée l’arrière-garde anglaise. Et c’est dans cette direction que le soldat entendit, ce soir-là, le bruit d’un corps de cavalerie légère lancé au grand trot, dans lequel il reconnut, avec étonnement, le général et son état-major. Il montait le grand cheval blanc que vous avez vu si souvent reproduit dans les journaux illustrés et sur les murs de l’Academy. La réception que lui firent les troupes fut des plus chaleureuses, mais il ne sembla pas vouloir perdre un seul instant en vaines cérémonies. Sautant de cheval, il se mêla immédiatement au groupe d’officiers qui l’attendaient, et entama avec eux une conversation animée, sur un ton confidentiel. Ce qui frappa surtout l’auteur du journal, c’est