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XI

L’ÉPÉE BRISÉE

La forêt tendait vers un ciel sombre, d’un bleu vert d’ardoise, ses mille bras gris, ses millions de doigts d’argent. Les étoiles étaient froides et brillantes comme des éclats de glace. Toute la campagne — dont les bois épais étaient, de loin en loin, parsemés de fermes — était raidie par une cruelle gelée. Les espaces noirs, entre les troncs, semblaient les cavernes insondables d’un impitoyable enfer scandinave, d’un enfer de froid infini. Il n’était pas jusqu’à la tour carrée de l’église qui ne parût septentrionale, au point de sembler païenne — comme une tour barbare, perdue parmi les rochers de l’Islande. Ce n’était pas une nuit que l’on eût choisie pour explorer un cimetière. Mais peut-être ce cimetière valait-il la peine qu’on l’explorât.

Il surgissait brusquement du désert cendré de la forêt, comme une sorte de bosse de gazon vert, que la lumière des étoiles faisait paraître