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nir. Il vint sous la forme de ce précieux prophète qui lui apprit à fixer, à l’œil nu, le disque du soleil. Cela s’appelait accueillir Apollon. Oh, si ces néo-païens consentaient à être simplement de vieux païens, ils en deviendraient plus sages ! Les anciens païens savaient que le culte brutal de la nature doit avoir un aspect cruel. Ils savaient que l’œil d’Apollon peut brûler et aveugler.

Il y eut un temps d’arrêt et le prêtre continua d’une voix douce qui se brisait sur certains mots :

— Que ce diable l’ait aveuglée intentionnellement ou non, il n’est pas douteux qu’il se servit de cette faiblesse pour la tuer. La simplicité même de son crime est écœurante. Vous savez qu’ils montaient et descendaient dans l’ascenseur, sans aucune aide. Vous savez aussi que l’ascenseur glisse doucement, dans le silence le plus parfait. Kalon hissa l’ascenseur jusqu’à l’étage occupé par la jeune fille et il la vit écrire lentement, comme écrivent ceux dont la vue faiblit, le testament qu’elle lui avait promis. Il lui cria joyeusement qu’il tenait l’ascenseur à sa disposition et qu’elle n’avait qu’à venir le rejoindre dès qu’elle serait prête. Puis il pressa le bouton et fila sans bruit à l’étage supérieur, traversa son bureau et sortit sur le balcon. Il priait, en toute sécurité, devant la rue bondée de monde, lorsque la pauvre fille, ayant achevé son travail, courut légèrement vers l’endroit où l’ascenseur et son amant devaient l’attendre et marcha…