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leil, comme il aurait pu le faire devant un guignol. Le prophète Kalon était déjà debout, vêtu de ses draperies d’argent, les mains levées, et le son de sa voix étrangement pénétrante, répétant sa litanie solaire, parvenait jusqu’en bas, dominant les bruits de la rue. Il était au milieu de sa prière, et son regard restait fixé sur le disque enflammé. Il est peu probable qu’il pût voir personne sur cette terre ; il est certain qu’il ne vit pas un petit prêtre, au visage rond qui, perdu dans la foule, le regardait en clignant des yeux. Telle était peut-être la différence la plus frappante qui distinguait ces deux hommes, si profondément divisés. Le Père Brown ne pouvait rien regarder sans cligner des yeux ; mais le prêtre d’Apollon pouvait fixer l’orbe du soleil de midi sans que sa paupière frémît un instant.

— Ô soleil, cria le prophète, ô étoile trop auguste pour être admise dans le concert des étoiles ! Ô source qui jaillit paisiblement en ce lieu secret que nous appelons espace. Père brillant de toutes les choses brillantes et vivaces, des flammes blanches, des fleurs blanches et des pics blancs. Père dont l’innocence ferait honte aux plus candides et aux plus sereins de tes enfants : pureté primitive, dans la paix de laquelle…

Un bruit, puis une chute, comme l’explosion d’une fusée renversée, suivis d’un cri strident et continu. Cinq hommes se précipitèrent vers la porte de la maison, tandis que trois autres en sortaient, et, pendant un instant, personne ne put se faire entendre. Le sentiment