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rien cacher à Flambeau. Rien d’étonnant non plus à ce que Flambeau, ayant entendu parler de la croix d’argent, s’efforçât de la voler ; c’était la chose la plus naturelle que pût relater l’histoire naturelle. Rien d’étonnant encore, évidemment, à ce que Flambeau l’emportât sur un mouton aussi stupide que l’homme au parapluie et aux nombreux paquets. Les individus de son espèce se laisseraient mener par le bout du nez jusqu’au pôle nord ; rien de surprenant à ce qu’un acteur comme Flambeau, déguisé en prêtre, ait pu le conduire jusqu’à Hampstead Heath. L’affaire semblait assez limpide ; et, tout en plaignant le prêtre pour son impuissance, le détective méprisait presque Flambeau pour avoir consenti à tromper une victime aussi crédule. Mais, lorsque Valentin songeait à tout ce qui s’était produit depuis lors, à tout ce qui l’avait conduit à la victoire, il se creusait en vain la cervelle pour y découvrir la moindre rime, la moindre raison. Quel rapport y avait-il entre le vol de la croix bleue, apportée à Londres par un prêtre d’Essex, et le fait d’asperger un mur de soupe ou d’appeler noix des oranges, ou de payer le prix d’un carreau pour le casser ensuite ? Valentin était arrivé à la fin de sa chasse, mais il n’en comprenait pas le milieu. Lorsqu’il lui était arrivé d’échouer dans ses recherches (ce qui était rare), il avait ordinairement suivi la piste mais manqué le criminel. Ici, il tenait le criminel, mais il ne pouvait comprendre la piste.

Les deux figures qu’il poursuivait rampaient, comme deux mouches noires, sur la crête im-