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compter la monnaie, à laquelle le détective ajouta silencieusement un énorme pourboire. Le garçon se redressa, les traits empreints d’une douce mais évidente animation.

— Ah ! oui, monsieur, dit-il. C’est une curieuse affaire.

— Vraiment ? Contez-nous cela, dit Valentin, avec une nonchalante curiosité.

— Voilà. Deux messieurs en noir sont entrés ici, dit le garçon, deux de ces prêtres étrangers qui courent les rues, par ces temps-ci. Ils prirent tranquillement un modeste petit déjeuner, et l’un des deux paya et sortit. L’autre allait le rejoindre lorsque, en comptant ma monnaie, je m’aperçus que j’avais reçu trois fois trop. « Eh là, dis-je au bonhomme qui sortait, vous m’avez donné trop ». « Oh, dit-il froidement, croyez-vous ? » « Oui », dis-je, en prenant la note pour lui montrer. Ah bien, cela m’a donné un coup.

— Que voulez-vous dire ? demanda son interlocuteur.

— J’aurais juré sur sept Bibles que j’avais écrit 14 shillings.

— Oui ! dit Valentin, se rapprochant lentement, les yeux ardents, et puis ?

— Le prêtre, à la porte, me dit doucement : « Fâché de brouiller vos comptes, mais ce sera pour le carreau ». « Quel carreau ? » dis-je. « Celui que je vais casser », dit-il, en y jetant son parapluie.

Les trois hommes poussèrent une exclamation, et l’inspecteur murmura :