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des rues du nord de Londres durant, semblait-il, plusieurs heures. L’illustre détective ne voulait pas s’expliquer davantage et peut-être ses aides sentaient-ils croître silencieusement en eux un doute de plus en plus troublant au sujet de sa mission. Peut-être aussi ressentaient-ils un désir aussi silencieux et aussi intense de déjeuner, car l’heure du lunch était passée depuis longtemps et les longues rues des faubourgs septentrionaux semblaient se prolonger indéfiniment comme les cylindres d’un télescope infernal. C’était un de ces voyages au cours desquels le voyageur a constamment l’impression d’avoir enfin atteint le bout du monde, pour se découvrir bientôt à l’entrée de Tuffnel Park. Londres s’éteignait en une traînée de misérables tavernes et de bicoques de banlieue pour renaître miraculeusement, un peu plus loin, en des rues brillantes et des hôtels bruyants. On eût dit treize villes vulgaires juxtaposées. Quoique le crépuscule d’hiver menaçât déjà d’envahir la rue, le détective parisien restait silencieux et attentif, examinant les façades des maisons qui défilaient devant lui, de chaque côté. Lorsqu’ils eurent laissé Camden Town derrière eux, les policemen commencèrent à s’assoupir. Ils sursautèrent lorsque Valentin bondit, une main sur l’épaule de chacun d’eux, et ordonna au cocher d’arrêter.

Ils dégringolèrent de l’impériale dans la rue sans bien comprendre la cause de cet émoi. Lorsqu’ils se tournèrent vers Valentin pour lui demander des explications, celui-ci leur désigna