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la cour des Himalaya Mansions, ils crurent voir s’ouvrir soudain une fenêtre devant eux. Ce bâtiment s’élevait au-dessus de Londres comme au-dessus d’une mer d’ardoises vertes. En face des mansions, de l’autre côté de la cour couverte de gravier, se trouvait un enclos rempli de buissons, qui ressemblait davantage à une large haie ou à une digue de verdure qu’à un jardin. Un peu plus bas, coulait une sorte de canal artificiel, comme le fossé de cette verte forteresse. Lorsque l’auto pénétra dans la cour, elle passa, au coin, devant l’échoppe portative d’un marchand de marrons. Au loin, à l’autre extrémité de la cour, Angus distingua la silhouette bleue d’un policeman marchant lentement. C’étaient les seuls êtres humains visibles dans cette sublime solitude faubourienne. Il eut l’impression irraisonnée qu’ils exprimaient la muette poésie de Londres ; ils lui apparurent comme les personnages d’un roman.

La petite voiture arriva sur la maison, comme un boulet de canon, et y projeta son propriétaire, comme une bombe. Celui-ci s’informa immédiatement auprès d’un grand concierge galonné d’or et d’un petit domestique, en manches de chemise, si quelqu’un ou quelque chose était venu pour lui. On lui certifia que rien ni personne n’avait passé, devant ces fonctionnaires, depuis son départ ; sur quoi, il s’engouffra avec Angus, quelque peu interdit, dans un ascenseur qui les emporta, avec la rapidité d’une fusée, jusqu’au dernier étage.

— Entrez donc un instant, dit Smythe sans