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V

L’HOMME INVISIBLE

Dans le froid crépuscule bleu, un magasin situé à Camden-Town, au coin de deux rues escarpées, brillait comme l’extrémité d’un cigare. Peut-être devrais-je dire comme le bout d’une pièce d’artifice, car la lumière multicolore qu’il répandait se réfléchissait dans plusieurs glaces et dansait gaiement sur une foule de gâteaux dorés et de confiseries diaprées. Les gamins avaient l’habitude de venir s’écraser le nez contre le flamboiement de la vitrine. Les pralines qui s’y trouvaient étaient enveloppées de ces papiers de couleur métallique — rouges, jaunes et verts — qui sont peut-être meilleurs que le chocolat qu’ils renferment, et il y avait, dans l’énorme wedding-cake, placé au milieu de la fenêtre, quelque chose de lointain et d’appétissant, comme si toute la calotte polaire eût été bonne à manger. Il est aisé de comprendre que cet arc-en-ciel provocateur attirât toute la jeunesse du voisinage, jusqu’à l’âge