Page:Chergé - Guide du voyageur à Poitiers et aux environs, 1872.djvu/290

Cette page a été validée par deux contributeurs.
280
NOTRE-DAME-LA-GRANDE.

rompus qu’en 1794. Il avait résisté à 1793, à 1793 qui avait banni les prêtres et tué le roi !! 1830, si anodin pourtant, dit-on, le balaya de son souffle desséchant. C’était encore une tradition, et, disons-le franchement, 1830, qui coupait violemment le fil de la tradition monarchique héréditaire, ne se souciait pas beaucoup d’en conserver d’autres. — C’était logique ; mais ce qui fut logique aussi, ce fut 1848 brisant l’œuvre de 1830.

Depuis lors on se contenta de faire dans l’intérieur de l’église la procession annuelle et d’user les manteaux donnés ; mais, il y a quelques années, l’usage de la procession a été repris, toutefois sans le concours de son ancien cortége officiel.

En 1871 cependant — deux mois à peine après la désastreuse guerre qui venait d’ensanglanter la France — cette procession avait revêtu une solennité particulière. Voyant les hordes prussiennes s’avancer rapidement sur la Loire et envahir les villes et campagnes voisines, les religieux habitants de Poitiers s’étaient de nouveau placés, par un vœu, sous la protection de Notre-Dame, de saint Hilaire et de sainte Radégonde. Or, chose remarquable, l’armée ennemie, au moment de l’armistice, s’était arrêtée juste aux extrêmes confins du département de la Vienne, et non-seulement la ville, mais le diocèse avaient été préservés de l’invasion prussienne. En mémoire de cette nouvelle protection, une Messe solennelle, fondée à perpétuité, avait été chantée, à Sainte-Radégonde, l’an dernier, le lundi de Pâques, c’est-à-dire le matin même du jour de la Procession des Clefs, et le soir, à cette procession, on portait de magnifiques cierges aux armes du Souverain Pontife et de l’Évêque de Poitiers offerts, par le vœu dont nous venons de parler, aux trois célestes intercesseurs.

Mais revenons à l’antique procession dite des Clefs.

Vous ne serez peut-être pas fâché, cher lecteur, de savoir quels étaient les détails de cette cérémonie si populaire chez nous, au temps de sa splendeur.

Le jour de Pâques, après les vêpres, l’épouse du maire, accompagnée des femmes des échevins et des