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MONTIERNEUF.


Leur église offrait une particularité assez rare dans les derniers temps, quoiqu’elle ne fût qu’un reste des traditions qui se sont conservées plus religieusement dans les églises d’Italie. La sainte réserve destinée aux malades n’était point déposée dans le tabernacle, mais dans un appareil suspendu par des chaînes légères à une crosse de grande dimension peinte en noir, qui se trouvait placée dans la chapelle de l’abside (aujourd’hui de la Sainte-Vierge).

La coutume de déposer la sainte hostie dans un tabernacle, sur le grand autel, est moderne, et, dans les monastères surtout, elle n’existait point aux temps de ferveur, où la sainte Eucharistie pouvait être sans crainte placée sous la seule garde de la foi. Aujourd’hui encore, en Italie, dans la plupart des basiliques, il existe une chapelle, celle dite du Saint-Sacrement, qui est spécialement affectée au dépôt sacré.

Le contingent scientifique fourni par l’abbaye de Montierneuf au monument élevé par les mains des laborieux enfants de saint Benoît est assez mince. Cependant cette abbaye compte quatre auteurs recommandables : le moine Martin, chroniqueur et premier historien de l’abbaye, dont les travaux ont été recueillis et publiés par D. Martenne ; puis Hugues et Richard de Poitiers, auteurs de la chronique de l’abbaye, publiée par d’Achéry (le dernier a composé seul une histoire universelle, dont quelques fragments se trouvent dans le Rerum gallicarum scriptores) ; enfin, Pierre de Poitiers, secrétaire de Pierre le Vénérable, abbé de Cluny, grand-prieur de cette abbaye, et plus tard abbé de Saint-Martial de Limoges, traducteur de l’Alcoran. Il fit ce dernier travail à la prière de son digne chef, dont il était tendrement aimé, et qui l’appelait son cher fils.

Prosateur et poëte, Pierre de Poitiers composa l’épitaphe inscrite sur le tombeau du fameux Abailard, et, après avoir célébré les vertus et la marche triomphale de Pierre le Vénérable à travers l’Aquitaine, il le défendit contre les poignards dont il fut menacé, deux ans