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LE COMTE KOSTIA

ter aux principes des choses, « comme si, disait-il, les choses avaient des principes, et comme si le hasard se laissait calculer. » Cela ne l'empêchait pas de dépenser lui-même beaucoup de logique à démontrer qu’il n’y en a point ni dans la nature, ni dans l’homme. Ce sont la de ces inconséquences que les sceptiques ne songent pas à se reprocher, ils passent tous leur vie à raisonner en s’escrimant contre la raison. Bref, le comte Kostia ne respectai que les faits : il estimait qu’à le bien prendre il n’y a que cela dans le monde, et que l’univers, conçu dans son ensemble, est une collection d’accidents qui se contrarient.

Membre de la Société d’histoire et d’antiquités de Moscou, il avait publié autrefois d’importants mémoires sur les antiquités slaves et sur quelques points controversés de l’histoire du Bas-Empire. À peine installé au Geierfels, 11 s’occupa de remonter sa bibliothèque, dont il n’avait emporté que quelques volumes à la Martinique. Il donna l’ordre qu’on lui expédiât de Moscou la plupart des livres qu’il y avait laissés, et il envoya d’importantes commissions à plusieurs libraires d’Allemagne. Quand son sérail (c était son mot) fut à peu près au complet, il se replongea dans l'étude, et en particulier dans sa chère Byzantine, dont il avait l’insigne bonheur de posséder l'édition du Louvre en trente-six volumes in-folio, et il en vint bientôt à former l'ambitieux projet d’écrire une histoire complète de l’empire byzantin depuis Constantin le Grand jusqu’à la prise de Constantinople, Il s’éprit si fort de ce grand dessein, qu’il en perdit presque le boire et le manger ; mais à mesure qu’il avançait dans