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qu’il se fait amener, il les leur abandonne, comme tu l’as vu. Que serait cet homme, s’il n’était protégé par une femme ? »

Le roi dit ensuite : « Ô Beder el Bedour, pourquoi ton mari ou toi, n’avez-vous pas demandé secours contre l’oppression ? pourquoi ne vous êtes-vous pas plaints ? » Elle répondit : « Ô roi du temps, ô sultan chéri, ô possesseur de nombreuses armées et d’alliés, pour ce qui est de mon mari, je n’ai pu jusqu’à présent le renseigner sur mon sort ; quant à moi, je n’ai rien à dire dont tu n’aies connaissance par les vers que j’ai chantés tout à l’heure. J’ai donné des conseils aux hommes au sujet des femmes, et cela depuis le premier jusqu’au dernier vers. »

Le roi dit : « Ô Beder el Bedour, tu me plais. Je t’ai questionnée au nom du Prophète, l’élu, le généreux, que le salut et la miséricorde de Dieu soient sur lui ! Donne-moi des renseignements sur tout ceci ; tu n’auras rien à craindre, je te donne l’aman[1] complet. Est-ce que ce nègre n’a pas joui de toi ? car je présume qu’aucune de vous n’a été à l’abri de ses tentatives et n’a eu son honneur sauf. »

Elle répondit : « Ô roi de l’époque, au nom de ton rang élevé et de ta puissance ! Vois ! Celui au sujet duquel tu m’interroges, je ne l’aurais pas accepté comme époux légitime, comment aurais-je consenti à me prêter avec lui à un amour défendu ! »

Le roi dit : « Tu parais être sincère, mais les vers que je t’ai entendue chanter ont fait naître des doutes dans mon esprit. »

Elle répondit : « Je n’ai tenu ce langage

  1. (56) L’aman, c’est-à-dire le pardon, l’absolution, la protection ; c’est le pacte, le traité qui confère la sécurité.