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refus ; les uns en pensaient du bien, les autres du mal.

Pendant longtemps on ne put avoir de renseignements positifs sur les causes d’une pareille conduite, et ces filles persévérèrent dans leur manière d’agir jusqu’à la mort de leur père. L’aînée d’entre elle fut alors appelée à lui succéder et reçut, de tous ses sujets, le serment de fidélité. Cet avènement au trône eut un grand retentissement dans tous les pays.

L’aînée des sœurs s’appelait Fouzel Djemal فـوز الجمال (la supériorité de la beauté ) ; la deuxième Soltana el Agmar سلطانة الاغمار (la reine des lunes) ; la troisième Bediâat el Djemal بديعة الجمال (l’incomparable comme beauté) ; la quatrième Ouarda وردة (la rose) ; la cinquième Mahmouda محمودة(la digne d’éloge) ; la sixième, Kamela كـاملة (la parfaite) et enfin la septième Zohra زهـرة (la beauté).

Zohra, qui était la plus jeune, était aussi celle de toutes qui avait l’esprit le plus développé et le jugement le plus sûr.

Elle aimait passionnément la chasse et, un jour qu’elle courait la campagne, elle rencontra, sur la route, accompagné d’une vingtaine de serviteurs, un cavalier qui lui adressa le salut ; elle le lui rendit. Le cavalier crut reconnaître la voix d’une femme ; mais, comme la figure de Zohra était recouverte par un pan de son haïk[1], il resta dans l’incertitude et se dit en lui-même : « Je voudrais bien savoir si c’est un homme ou une femme ! » Il s’adressa à un des serviteurs de la princesse qui dissipa ses doutes. S’approchant alors de Zohra, il s’entretint d’une façon aimable

  1. (163) Le haïk est une longue pièce d’étoffe légère et blanche, généralement en laine et soie, dont les Arabes s’enveloppent le corps et la tête et par dessus laquelle ils portent leurs burnous.