Page:Chefs-d’œuvre de Lord Byron, trad. A. Regnault, tome II, 1874.djvu/82

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— « Gulnare, non jamais ma fortune avilie
N’abaissa plus mon nom et ma gloire flétrie.
Seyd mon ennemi, d’une implacable main,
Mais loyale, a des miens balayé tout l’essaim.
Aussi suis-je venu dans ma barque de guerre
Frapper mon adversaire avec mon cimeterre.
C’est mon arme, non pas le fer de l’assassin.
Celui qui d’une femme a respecté le sein
Ne saurait égorger dans le sommeil sa proie.
Femme, je t’ai sauvée avec bonheur et joie,
Mais non pas à ce prix. Empêche qu’un bienfait
Se perde injustement par un lâche forfait.
Mais à présent, adieu. La paix soit en ton âme ;
De mon dernier repos la nuit court. Adieu, femme.
« Du repos !… à l’aurore, ah ! tes nerfs frémiront,
Autour du pal aigu tes membres craqueront.
J’entendis le signal, je vis l’affreux indice :
Non, je ne verrai point de mes yeux ton supplice ;
Si tu péris, je meurs. Ma vie et mon amour,
Ma haine, et ce qu’ici j’éprouve tour à tour,
Sont un jeu du destin, un coup suffit, Corsaire.
Inutile de fuir. Et comment me soustraire
À sa poursuite sûre ? À mes torts impunis,
À mon âge en sa fleur, à mes beaux jours flétris,
Un seul coup mettra fin, ainsi qu’à toutes craintes.
Mais puisque le poignard sied moins à tes étreintes
Que le fer, j’essaierai d’une femme la main.