Page:Chefs-d’œuvre de Lord Byron, trad. A. Regnault, tome II, 1874.djvu/69

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Si Conrad paraissait, la frapperait d’abord.
Un bateau démâté touche enfin Je rivage,
Tristes débris tronqués de tout un équipage.
Ses hôtes ont trouvé l’objet qu’ils ont cherché,
Ils ont sur Médora leur regard attaché.
Quelques uns sont blessés, tous brisés de souffrance,
Ils vivent, mais comment ? Personne n’en sait rien.
L’un l’autre s’évitant semble attendre en silence
Que chacun de Conrad explique le destin.
Ils auraient à parler. Une dure contrainte
Étouffe leurs accents enchaînés par la crainte
Que Médora n’entende à ses sens retentir
Des mots qu’elle a compris sans trembler ou pâlir,
Dans la vive douleur qui déchire son âme,
Sous des traits délicats, Médora, forte femme,
Cache des sentiments d’énergique vigueur,
Et dont l’explosion éclate enfin du cœur.
Tant que dure l’espoir, elle pleure attendrie,
Tout perdu, sa tendresse alors dort assoupie.
Mais de ce sommeil sort une force à son tour,
Qui dit à haute voix : pour ton cœur plus d’amour,
Mais plus de crainte aussi, surnaturel empire !
Force unique qui vient de son fiévreux délire !
« Vous demeurez muets… Ne parlez pas. Pourtant
Je brûle de savoir… Je ne veux rien entendre.
Pas un mot, je sais tout et je puis tout comprendre ;
Ma lèvre hésite et tremble… Ah ! dites à l’instant