Page:Chefs-d’œuvre de Lord Byron, trad. A. Regnault, tome II, 1874.djvu/62

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À cet homme pour qui tout récemment ce bras
Te sauva du milieu des feux et du trépas ? » —
« Mon amour pour Seyd ? pour ce farouche maître ?
Oh ! non, non, mon amour… jamais ce ne peut être !
Et cependant ce cœur, qui ne s’efforce plus,
S’efforça de répondre au sien, vœux superflus.
L’amour, je le sens bien, dans un cœur libre habite.
Oui, je suis une esclave, esclave favorite,
Partageant sa splendeur, mais non sa passion.
Combien de fois je dois subir cette question
Et ces mots : « M’aimes-tu ? » Mon âme à son ivresse
Brûle de dire non ! Ah ! pour cette tendresse,
Qu’il m’en coûte de feindre un tendre sentiment,
Et pour ne pas haïr, de lutter vainement !
Mais de l’aversion plus dure est la souffrance
Au cœur qui se soulève alors de répugnance.
Il me prend une main que je ne donne pas,
Mais sans la refuser laisse froide en ses bras.
Mon pouls ne s’émeut point non plus qu’il ne s’arrête,
Et quand Seyd la rend à l’amante muette,
Elle tombe sans vie et je la sens languir.
Je n’aimai point Seyd assez pour le haïr.
Ma bouche sans chaleur d’un baiser craint la trace
Et son toucher me fait frissonner et me glace.
Oui, si j’eusse jamais senti la passion
De la haine, du moins, j’aurais l’émotion.
Il part non regretté, revient sans qu’on l’appelle,