Page:Chefs-d’œuvre de Lord Byron, trad. A. Regnault, tome II, 1874.djvu/38

Cette page n’a pas encore été corrigée

D’avance capturé, soit encore bien loin.
Il suffit de voguer, c’est là l’unique peine,
La victoire ne doit coûter aucun effort.
Du forban prisonnier on a gagné le port,
Et demain le soleil va luire sur sa chaîne.
Le guet peut jusque-là sans crainte s’endormir,
Sans même s’éveiller pour combattre à loisir,
Rêver guerre et bataille et tuer même en rêve :
Libre a qui le voudra de courir sur la grève,
D’éprouver sur les Grecs sa bouillante valeur.
Un tel exploit sied bien à tout homme de cœur,
À ce fier musulman, enturbanné, ce brave,
De dégainer le fer nu sur un pauvre esclave,
De piller sa maison, en épargnant son sang,
Miséricordieux parce qu’il est puissant,
Dédaignant de frapper, comme il le pourrait faire,
À moins qu’un gai caprice à son humeur guerrière
Ne suggère le coup contre son ennemi,
Pour exercer son bras et charmer son ennui.
La nuit coule en orgie, en maint banquet, en fête.
Celui-là doit sourire au maître musulman,
Servir le meilleur mets au despote gourmand,
Qui veut sur son épaule encor garder sa tête ;
Et d’imprécations amasser les trésors
Jusqu’à ce que l’on ait partout purgé ces bords.