Page:Chefs-d’œuvre de Lord Byron, trad. A. Regnault, tome II, 1874.djvu/22

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Résistant à l’absence et ferme en tous pays,
Et beaucoup plus encor, par le temps ravivée.
Car son espoir déçu, car ses projets trahis,
Près de la bien-aimée, accordant un sourire,
Sous le poids du dépit ne purent l’irriter.
Il ne laissa jamais dans un fougueux délire
Une plainte, un murmure, un seul mot éclater ;
Et sa pensée enfin, heureuse de la joindre,
La quittait avec calme, avant qu’un air chagrin
Pour affliger son cœur parût et vînt à poindre,
Qu’un nuage troublât son front toujours serein.
Si parmi les mortels l’amour jamais respire,
C’était l’amour ! Conrad fut un homme perdu :
Mais ni la passion, sa force et son empire
Croissant, quand était morte en lui toute vertu,
Ni le rôle odieux qui tua tout le reste,
Ne put éteindre en lui cette flamme céleste.

XIII


Il s’arrête un moment, attendant au détour
D’un sentier, ses soldats du val suivant la pente.
« Bruit étrange, dit-il, j’ai vu maint mauvais jour,
Couru plus d’un péril ; mais en cette heure instante,
Je ne sais pas pourquoi je pressens le dernier.
Mon cœur, qui le prédit, pourtant ne doit point battre ;