Quand on sait aimer et plaire,
A-t-on besoin d'autre bien ?
Rends-moi ton coeur, ma bergère,
Colin t'a rendu le sien.
Mon chalumeau, ma houlette,
Soyez mes seules grandeurs ;
Ma parure est ma Colette,
Mes trésors sont ses faveurs.
Que de seigneurs d'importance
voudraient bien avoir sa foi !
Malgré toute leur puissance,
Ils sont moins heureux que moi.
Scène VI
COLIN à part.
Je l'aperçois... Je tremble en m'offrant à sa vue...
Sauvons-nous... Je la perds si je fuis...
COLETTE à part.
Il me voit... Que je suis émue !
Le coeur me bat...
COLIN.
Je ne sais où j'en suis.
COLETTE.
Trop près, sans y songer, je me suis approchée.
COLIN.
Je ne puis m'en dédire, il a faut aborder.
À Colette, d'un ton radouci, et d'un air moitié riant, moitié embarrassé.
Ma Colette... Êtes-vous fâchée ?
Je suis Colin : daignez me regarder.
COLETTE osant à peine jeter les yeux sur lui.
Colin m'aimait ; Colin m'était fidèle :
Je vous regarde, et ne vois plus Colin.
COLIN.
Mon coeur n'a point changé ; mon erreur trop cruelle
Venait d'un sort jeté par quelque esprit malin :
De devin l'a détruit ; je suis, malgré l'envie,
Toujours Colin, toujours plus amoureux.