Page:Chavette - Les Petites Comédies du vice, 1890.djvu/9

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Il est condamné à mort.

En rentrant au logis, l’employé juré se dit :

— Voici une excellente occasion de rendre tous les dîners que j’ai reçus.

Aussi, le moment arrivé, écrit-il à ses amis :

« Nous guillotinons Saint-Phar jeudi : venez donc me demander à déjeuner, j’ai trois fenêtres sur la place et un rare cordon bleu. Nous verrons à rire un peu ».

Au jour dit, tous les amis sont au rendez-vous de l’employé, qui a aussi invité son chef de division, homme influent qui le protège.

Comme aucune exécution publique n’a eu lieu depuis cinquante années dans la ville, on a négligé le personnel de l’exécution.

Le bourreau est un vieillard débile.

Son premier aide a quitté cette terre.

Le second valet relève d’une longue maladie qui l’a laissé sans forces.

Si le condamné, qui est un Hercule, n’y met pas un peu de bonne volonté, la justice des hommes sera difficilement satisfaite.

Au moment du dessert, arrive de la prison cette terrifiante nouvelle :

— Saint-Phar ne veut pas se laisser taquiner.

Désespoir des invités, qui s’écrient en chœur :

— Voici notre petite fête gâtée ! On ne peut plus compter sur rien !

Le chef de division fronce le sourcil.