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c’est mon parrain ; prenez vos informations près de lui.

— Parfait ! Le baron me suffit ; je le connais… un homme qui de sa vie n’a menti ! Ce qu’il me dira sera pour moi vraie parole d’Évangile, je vous le jure.

Je courus chez mon parrain. J’eus l’éloquence d’un amoureux pour lui parler de l’idole de ma passion, de mes projets, etc.

— Très bien, garçon, c’est de ton âge ; mais rends-moi le service de me dire un peu en quoi tout cela me regarde.

— Ah ! voici, parrain. Le père m’a demandé si je possédais de la fortune. Comme j’avais vingt louis sur moi, j’ai répondu aussitôt que je n’étais pas sans argent, et…

Le baron sourit doucement : il me contempla avec cette intime satisfaction du maître qui voit progresser son disciple.

— Ah ! ah ! filleul, je reconnais que tu commences à pratiquer assez adroitement la théorie des biais.

— Ce n’est pas tout, parrain. En sentant que le père allait insister sur la question, j’ai pensé à vous et je vous l’ai détaché aux informations sur l’état de ma fortune.

— Comment, malheureux ! tu n’as pas deux cents francs de rente, et tu veux que moi…, qui n’ai jamais menti…, j’ose attester ta fortune !!!

— Sans attester positivement… il me semble qu’avec un biais… un de vos remarquables biais…

— C’est impossible ! Va te promener avec tes biais ! A-t-on jamais vu un pareil gamin ? Venir me de-