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fille qui s’établit, je voulais aller tout conter à mes amies de pension. Nous n’avions alors d’autres enseignes que : C’est ici ; moi je taquinais Lesourd pour obtenir : Reposoirs hygiéniques ; quand, le jour de ma fête, comme cadeau, il fit inscrire en lettres roses : Au général Cambronne, cette gloire de la France qu’on n’avait pas encore dépouillée. Depuis, tout a prospéré ; le ciel a béni nos sueurs ainsi que celles de Gaétan qui continua l’œuvre de son beau-père défunt. Le tracas des affaires nous a consolés tous deux de notre commun veuvage.

Le monsieur. — …?

La marchande. — Je dois être riche, dites-vous ? — Malheureusement, non. On se figure que nous gagnons des mille et des cents ; quelle erreur ! Il reste bien peu de chose, croyez-moi, quand on a payé les impôts, les fournitures et surtout la remise aux médecins qui nous ronge. Je ne vous parle pas des réparations perpétuelles à exécuter, car il est des gens qui éprouvent le besoin de mal faire. Nous avons beau repeindre nos murs à neuf, le lendemain une main a écrit : Ici, le photographe Pierre Legrand opère lui-même, ou autres devises moins innocentes. Comment empêcher cela ? On ne peut cependant pas faire suivre chaque consommateur par un sergent de ville ? — Oh ! oui, allez ! nous sommes dévorés par les frais ! Si j’étais riche comme vous le pensez, je me retirerais à la campagne, et Gaétan, — qui sait combien, à mon âge, il est pénible de changer d’air, — me louerait une chambre à Bondy pour