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« Ah ! baron, si vous étiez arrivé cinq minutes plus tôt, vous auriez pu vous assurer que le rose me va bien ; j’étais en toilette ; tenez, j’ai même encore mes bottines roses ». De cette manière-là, il aurait cru que tu m’avais payé la robe.

Loulou, froissé. — Ah çà, il se figure donc que je suis inscrit aux indigents, ton baron ? Je ne tiens pas à lui monter cette comédie ; Dieu merci ! J’ai le moyen de te donner trois louis pour acheter ta robe rose.

Niniche. — Mais non, gros bête, mais non, je n’en veux pas. C’est pour le coup que tu dirais que j’achète « des inutilités, » si j’allais mettre trois louis à une robe qui tourne en chiffon au troisième jour et dont la couleur ne fait qu’un déjeuner de soleil… Oh ! non, je suis plus femme de ménage que ça… Si je m’achetais une robe, je la voudrais… bien de profit… de toutes les saisons… d’une teinte plus sérieuse… plus solide… en satin de Lyon, par exemple, — enfin une robe de quatre louis.

Loulou. — Comment, le satin de Lyon ne coûte que quatre louis ?

Niniche. — Mais pas plus… en les ajoutant aux trois louis que tu me dois déjà pour ma robe rose. Ah ! c’est là que le baron Tosté ragerait de voir que je n’attends pas après son argent pour m’habiller.

Loulou, jaloux. — Et je lui prouverai que tu n’attends pas ! (Décidé.) Au premier magasin, tu vas acheter ta robe.

Niniche. — Justement, à cent pas d’ici, il y en a un très bien assorti.