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de vingt-cinq sous. Hein ! suis-je femme de ménage ? J’espère que voilà un objet d’utilité ?

Loulou. — Est-ce que l’on ne peut faire du thé dans la cafetière ? Tu sais, moi, je te le demande naïvement, ce n’est pas pour te refuser une théière.

Niniche. — Mais, au contraire, tu as raison ; c’est une idée ! Du moment qu’on peut faire du thé dans une cafetière, je ne tiens pas à mon ustensile ; d’autant plus que je ne manque pas d’autres objets aussi utiles à acheter… des bottines, par exemple.

Loulou. — Des bottines !! Mais je t’en connais plus de vingt paires !!

Niniche. — Oui, mais pas des bottines roses… J’en ai vu de très jolies affichées à quinze francs… il est vrai qu’avec des bottines roses il faut avoir tout le vêtement de pareille couleur… mais les bottines suffisent pour mon projet.

Loulou, inquiet. — Quel projet ?

Niniche. — Je veux bien te le dire, mais il ne faut pas encore être jaloux. — C’est pour faire engager le baron Tosté ; avec son immense fortune, il se figure qu’on triomphe de tout. Aussi, l’autre jour, comme je lui disais que le rose me va très bien, il s’est mis à m’offrir… m’offrir… gros comme moi… et c’était des « Votre Loulou » par-ci, « Votre Loulou » par-là, comme s’il parlait d’un panné qui n’a pas les moyens d’offrir une robe… en taffetas rose… très léger… d’une soixantaine de francs. Alors je me suis promis, pour humilier le baron, à sa première visite, de le recevoir en robe de chambre avec mes bottines roses, et de lui dire :