Monsieur. — Tu pourrais bien dire de la gourmandise.
Madame. — Soit ! mais il se contente simplement d’une aile, tandis que toute la bête est à lui.
Monsieur. — La colonne aussi est à l’Empereur ; seulement on peut y toucher !
Madame. — Mais nous pouvons toucher à la poularde !
Monsieur. — Allons donc ! Je connais mon Lemadru ! Il a l’air comme ça bon garçon, mais, au fond, il est susceptible au possible.
Madame. — Non, non ! je suis sûre qu’il ne soufflerait mot si nous mangions un simple petit pilon.
Monsieur. — Chacun ?
Madame. — Naturellement.
Monsieur. — Alors il faudra lui dire que c’est ta mère qui est venue nous demander tout à coup à dîner, en traversant Paris pour aller d’Amiens à Nice.
Madame. — À quoi bon ? Tu as l’air d’avoir peur de Lemadru…
Monsieur — Moi ? peur !… que ce pilon m’étouffe, si j’en ai peur ! Il faudrait un autre homme que lui ! Avec ça que, depuis trente ans, je n’ai pas été à même de le juger ? C’est un bon garçon, oui ; mais un courageux… autre affaire !
Madame. — Je m’en doutais ; il fait trop parade de sa bravoure.
Monsieur. — Il est si menteur !
Madame. — Tu ne sais pas ce que nous pouvons faire ?
Monsieur. — Quoi ?