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On le faisait entrer par la cuisine, où il guettait pendant deux heures la sortie du guerrier, en causant avec la bonne, dont il payait la discrétion deux cents francs par mois. — Il fermait aussi la bouche du concierge, du cocher, de la cuisinière, qui, pour le remercier, ne cessaient de lui vanter la générosité du général qui était si riche.

À tout instant, le nom de son rival lui tintait aux oreilles.

Mais il se disait en regardant sa figure : « Le pauvre homme, quel sot rôle je lui fais jouer ! »

Comme il était aimé, il devait flatter la vanité de l’ange.

Gantier, tailleur, bottier gonflaient leurs notes.

Car il fallait être sans cesse en tenue d’homme aimé.

Riche-en-laid venait chez sa maîtresse en paletot sac et en bottes crottées qu’il étalait sur un divan.

Au matin, il la quittait par un simple : « À ce soir ».

Il descendait le grand escalier lourdement, en plein midi, à la vue du concierge, qui s’inclinait humblement, et il partait fumer son cigare, la chaussure propre et le linge frais, car il avait, chez la belle, place réservée pour un trousseau de rechange.