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d’autres fois, par suite du rapprochement des terres, nous les apercevions toutes deux à l’œil nu ; les perdre de vue l’une ou l’autre fut l’exception.

Ainsi, nous pûmes saluer de loin, dans la brume bien entendu, d’un côté Médine et la Mecque ; de l’autre Djeddah, que devait rendre célèbre, peu d’années après, l’assassinat de notre consul, tragédie qui finit comme une comédie, par le mariage de la fille de la victime avec son sauveur.

Une fois, la femme du général F… fit son apparition sur le pont ; elle y produisit presque une révolution parmi les dames anglaises, qui sont aristocratiques par instinct et conservent plus de préjugés en faveur de l’aristocratie de la peau que pour l’autre.

Le général nous la présenta comme une princesse de la cour de Téhéran. Par malheur, sa princesse était noire à rendre des points à une indigène de la côte de Guinée et d’une laideur qui est presque la confirmation de cet aphorisme mis en circulation par un savant spirituel : l’homme descend du singe.

Nous autres Français, tout en reconnaissant que madame F… n’avait pas encore dépouillé sa première incarnation, nous fîmes à cette pauvre femme, maladive et faible, un accueil convenable ; mais aucune dame anglaise ne lui adressa la parole ; je dois ajouter même qu’elle dut se résigner à prendre ses repas dans sa cabine sur un avis officieux de l’ordonnateur.