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CHARLES GUÉRIN.

bonnes religieuses, il y en avait un qui revenait plus souvent que les autres et qui avait nom Clorinde.

Il essaya en vain pendant tout l’office de chasser des pensées, qui ne convenaient ni au lieu, ni aux circonstances ; elles revenaient avec toute la persistance particulière à ce que l’on appelle, en langage ascétique, des distractions, persistance qui justifie à nos yeux le réformateur Luther d’avoir cru voir le diable sous la forme d’une grosse mouche.

Deux choses seulement purent faire sur l’esprit de Charles une impression assez vive pour vaincre un instant ce charme mondain. Les lugubres prières que l’on chante, tandis que la nouvelle religieuse est étendue sous un drap mortuaire et fait son apprentissage de la mort, vinrent raviver une douleur trop récente pour ne pas être bien véritable.

L’autre chose qui attira son attention fut l’écusson de marbre que Lord Aylmer venait de faire incruster dans le mur de l’église à droite, tout près de l’endroit où il se trouvait agenouillé.

Tout un monde d’idées se présentait renfermé dans cette noble et touchante inscription :

honneur
à
montcalm !
le destin lui dérobant
la victoire
la récompensé par
une mort glorieuse !

Il aurait fallu ne pas être doué d’autant d’imagination et de patriotisme qu’en possédait notre héros, pour lire sans émotion Cet éloge laconique, placé au-dessus d’une fosse, qu’une bombe avait creusée d’avance.

Au sortir de l’église, Charles fut réjoint par un jeune homme qu’il avait rencontré plusieurs fois dans le monde.

C’était précisément un de ces fâcheux qui vous abordent de préférence au moment où vous voulez être seul, et qui ne