Page:Chauveau - Charles Guérin, roman de mœurs canadiennes, 1853.djvu/315

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
305
CHARLES GUÉRIN.


VI.

TOUT CHEMIN MÈNE À ROME.

.



LOUISE était assise à la fenêtre de sa mansarde. C’était le soir. La chaleur excessive des jours précédens s’était abaissée par degrés. Un orage qui venait de passer sur la ville, avait purifié l’atmosphère. L’eau coulait encore par torrens dans la petite rue étroite et d’une pente abrupte, le soleil couchant dorait les nuages refoulés vers l’horizon, et qui s’éloignaient en grondant, une teinte d’un vert éclatant couvrait les belles campagnes de Beauport et de Charlebourg, et l’on aurait pu compter les maisons blanches éblouissantes qui parsemaient le paysage, rapproché par un effet magique de lumière. Si elle avait pu oublier le fléau qui n’avait pas encore cessé ses ravages, la jeune fille se serait presque sentie heureuse en aspirant l’air frais et humide, qui lui arrivait à travers les branches du lilas de son petit jardin, et les fleurs qu’elle cultivait sur l’appui de sa fenêtre. Mais sa poitrine avait peine à se dilater au souffle de la brise, et ses yeux distraits ne jouissaient qu’à demi du gracieux épanouissement de la nature. De longs soupirs agitaient son sein, et de grosses larmes demeuraient suspendues à ses paupières, comme les gouttes de pluie aux feuilles des roses.