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CHARLES GUÉRIN.

— Vous avez bien dit un trésor, confrère, car il ferait sa fortune en très peu de temps.

— Oui, il aurait une assez jolie passe dans le monde, ce monsieur.

— Et cependant pour cela il faudrait remonter à la cause et nous en sommes loin encore : tout ce que nous avons pris jusqu’à présent pour le principe de la maladie n’est que symptômes. Je ne trouve rien de raisonnable dans tout ce qu’on a dit sur ce sujet, et j’avoue néanmoins que mon imagination ne me présente rien de nouveau. La chimie moderne qui se perfectionne si rapidement trouvera peut-être dans l’atmosphère la cause du mal. Il est vrai pourtant, que l’analyse de l’air atmosphérique n’a encore rien présenté de bien remarquable. Si j’étais fataliste, je comparerais ce fléau aux plaies d’Égypte, ou aux signes terribles de l’apocalypse, et j’en concilierais qu’il n’y a rien à faire que de lui laisser accomplir sa mission providentielle.

— Que dites-vous de ma théorie électrique, demanda timidement Jean Guilbault ?

— Eh ! bien, elle n’est pas plus improbable que toutes les autres, mais elle ne m’est pas plus démontrée.

— Allons, docteur, si vous pensez que l’électricité peut avoir quelque chose à démêler avec le choléra vous ne devez pas rire de mes passes magnétiques. Le magnétisme animal, dont l’existence ne peut se nier, doit se rattacher au magnétisme terrestre ; le magnétisme terrestre s’identifie de plus en plus avec l’électricité…

— Oui, et voilà pourquoi votre fille est muette, s’écria avec emphase le gros médecin, tout fier de prendre sa revanche contre le parisien.

En ce moment on frappa légèrement et discrètement à la porte extérieure de l’apothicairerie.

— Entrez ! répondit-on.