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CHARLES GUÉRIN.

IV.

DE BEAU-PÈRE A GENDRE.



IL était dit que notre héros marcherait ce jour-là de surprise en surprise ; car, en rentrant chez lui, il apperçut tranquillement assis dans sa chambre M. Wagnaër lui-même.

Il fit deux pas en arrière, et l’air consterné qu’avait dans ce moment ce visiteur inattendu, contribua autant que tout le reste à l’étonnement que Charles manifesta.

Les premiers saluts échangés, il ne put s’empêcher de lui dire : Mais comment M. Wagnaër, vous n’avez pas encore vu Mademoiselle Clorinde ? Je l’ai rencontrée, il y a un instant, elle paraît vous croire à la campagne.

— Ne m’en parlez pas ! cette pauvre enfant, je suis si occupé, tellement tracassé, que je n’ai pas encore eu le temps de la voir. Je n’ai fait depuis que je suis ici que des affaires, et ce sont encore les affaires qui m’amènent chez vous. Des affaires, jeune homme, des affaires ! Ça ne se fait pas comme on veut, par le temps qui court. Il y a de quoi se pendre rien qu’à y songer. L’argent, ça ne se connaît plus. Les billets de banque, ça ne se voit plus. Les billets promissoires, ça ne s’escompte plus. Il n’y a jamais eu une crise semblable. On saignerait le bonhomme Shouffe, le plus vieux et le plus riche des