ray aprês avoir recité les honneurs que le
Roy de Siam fit rendre à la Lettre de Sa
Majeſté. Il eſt vray qu’il a de coutume de
rendre honneur aux Lettres des Potentas
qu’il reçoit par leurs Ambaſſadeurs ; mais
il a voulu avec juſtice faire une diſtinction
de celle de notre grand Monarque. Il vint
quarante Mandarins des premiers de ſa
Cour, dont deux qui étoient Oyas, c’eſt à dire
comme ſont les Ducs en Françe, qui
me dirent que tous les balons étoient à ma
porte pour prendre la Lettre de Sa Majeſté,
& me mener au Palais. La Lettre
étoit dans ma chambre en un vaſe d’or
couvert d’un voile de brocard très-riche.
Les Mandarins étant entrez ils ſe proſternerent
les mains jointes ſur le front, le
viſage contre terre, & ſaluërent en cette
poſture la Lettre du Roy par trois fois.
Moy étant aſſis ſur un fauteuil auprès de
la Lettre, je reçus cet honneur, qui n’a
jamais été rendu qu’à celle de Sa Majeſté.
Cette ceremonie finie, je pris la Lettre
avec le vaſe d’or, & après l’avoir portée
ſept ou huit pas, je la donnay à Monſieur
l’Abbé de Choiſy, qui étoit venu de Françe avec moy.
Il marchoit à ma gauche un
peu derrière, & il la porta juſqu’au bord
de la riviere, où je trouvay un balon
extrêmement beau, fort doré, dans
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