sion qu’il méritoit : on ne put jamais le ramener à des sentimens plus doux.
On lui avoit dit que les Juifs recevoient en gage, pour l’argent qu’ils prêtoient à usure, des crucifix d’un grand prix, & mêmes des calices, qu’ils prophanoient jusqu’à s’en servir dans leurs repas ; qu’on venoit de trouver par révélation une croix d’or & un livre d’évangiles orné de pierreries qu’ils avoient cachés dans un infame cloaque ; que tous les ans à la fête de Pâques ils enlevoient un enfant chrétien sur lequel ils renouvelloient le supplice que leurs ancêtres avoient fait souffrir à Jesus-Christ.
L’horreur de tant d’abominations, réelles ou supposées, rendit pendant long-tems le roi insensible à toutes les prieres qu’on lui fit ; mais le besoin d’argent, selon toutes les apparences, l’engagea à les rappeller : les Juifs revinrent donc exercer leurs pirateries. Il est bon de faire connoître à cette occasion quel étoit leur état en France. Tout Juif établi dans le royaume étoit alors serf ; sa personne, ses biens & ses meubles appartenaient au baron des lieux qu’il habitoit ; la loi lui défendoit de changer de domicile sans la permission du maître,