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parjures, conjurations de démons : « Que dire, en effet, de ceux qui croient aux divinations tirées du vol des oiseaux, des sorts, des rêves, d’une porte qui crie, d’un rat qui ronge, ou autres sottises pareilles ». Mais il faut en venir aux tromperies, que facilitent les mensonges et la flatterie. Doit-on parler des malédictions, des reproches, des mépris du cœur courroucé ? Colère inspire les mauvais conseils du traître, encourage l’homme à semer la discorde parmi ses semblables, à proférer des menaces et de vaines paroles, à prolonger les discussions, à prodiguer les moqueries.

Le remède est cette vertu qu’on appelle Mansuétude ou Bénignité. Patience est une autre vertu dont il existe quatre variétés qui aident respectivement à souffrir les mauvaises paroles, le tort matériel, le mal physique, le travail excessif. « Un jour un philosophe, voulant châtier son disciple, chercha un bâton, et quand l’enfant vit le bâton, il dit à son maître : Que pensez-vous faire ? — Je veux te frapper, dit le maître, afin de t’amender. — En vérité, s’écria l’enfant, vous devriez commencer par vous amender vous-même, qui avez perdu toute votre patience pour une faute d’enfant. — En vérité, s’écria le maître tout en larmes, tu dis vrai ; prends moi le bâton et châtie-moi pour mon impatience. » De Patience vient Obéissance qui est parfaite, quand un homme fait tout ce qu’il doit faire.

De Aggidia.

Si Envie aveugle le cœur de l’homme et si Colère le trouble, Paresse l’alourdit. C’est un péché mortel, car le Livre dit : Maudit soit celui qui fait le service de Dieu négligemment. En quelque état que se trouve l’homme, Paresse est son ennemi. « Dans l’état d’innocence, il doit travailler à glorifier et adorer Dieu ; dans l’état de péché, à prier pour son amendement ; dans l’état de grâce, il est tenu d’accomplir les œuvres de pénitence. » Or Paresse ne souffre ni peine ni pénitence. Pour combattre ce péché l’homme doit s’habituer à accomplir de bonnes œuvres. « Le travail, dit saint Bernard, donne à l’ouvrier des bras forts et des muscles durs, Paresse l’affaiblit et l’énerve. » Puis vient Désespoir engendré par une douleur ou une crainte excessives. Celui qui désespère n’hésite devant aucun péché, témoin Judas. Que ne songe-t-il à la miséricorde divine dont tout pécheur repentant peut-être l’objet, au fils prodigue, au bon larron sur la croix ? Somnolence vient ensuite qui engourdit le corps et l’âme, et Négligence, « nourrice de tout mal comme Ignorance en est la mère », et Tarditas qui éloigne l’homme de Dieu, et Tristicia qui cause la mort de l’âme.

La vertu appelée Fortitudo est le remède à employer contre ce péché. « Elle est en diverses sortes : Magnanimité, c’est-à-dire grand courage, Magnificence, quand un homme achève les grandes œuvres de bien qu’il a commencées, Constance ou stabilité de courage. » Il y a d’autres remèdes à ce péché dans diverses œuvres, dans la méditation sur les peines éternelles et les joies du Paradis, dans la foi en la grâce du Saint-Esprit.