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et a voulu essayer tour à tour son courage
dans la liberté, et aussi dans le mariage ;
son brandon à la main
elle danse devant l’épousée et toute l’assemblée.
Et certainement, j’ose le dire,
1730Hymeneus, qui est le dieu du mariage,
n’a de sa vie vu si joyeux marié.
Fais silence, ô toi, poète Marcien[1],
qui nous décris les noces joyeuses
de Philologie et de Mercure,
et les chansons que les Muses chantèrent.
Trop petites sont et ta plume et ta langue,
pour décrire ce mariage.
Quand la tendre jeunesse épouse la vieillesse courbée,
il y a tant de gaîté qu’on ne peut le décrire.
1740Essayez-en vous-mêmes, alors vous pourrez voir
si je mens ou non en cette matière.

Mai se tenait assise avec un si doux visage
que la contempler semblait chose féerique ;
La reine Esther ne regarda jamais avec de tels yeux
Assuérus — tant son regard était timide !
Je ne puis vous décrire toute sa beauté,
mais pourtant de sa beauté je puis vous dire
qu’elle était comme le brillant matin de mai
rempli de toute beauté et toutes délices.
1750Janvier est ravi en extase,
chaque fois qu’il regarde son visage ;
mais en son cœur il commence à la menacer
de la presser cette nuit-là dans ses bras
plus fort que jamais Pâris ne fit Hélène.
Mais, néanmoins, il avait grande pitié
que cette nuit-là il lui fallût l’offenser ;
il se disait : « Hélas ! ô tendre créature,
veuille Dieu que vous puissiez endurer
toute mon ardeur, tant elle est aiguë et vive.
1760J’ai peur que vous ne la puissiez soutenir,

  1. Martianus Minneus Félix Capella, né à Carthage au ve siècle, écrivit De Nuptiis Philologiae et Mercurii, en deux livres, suivis de sept livres sur les sept sciences.