Et Thésée les fait quelque temps reposer,
pour se remettre, et boire, s’ils ont envie.
Mainte fois dans le jour les deux Thébains
se sont rencontrés et se sont malmenés.
Ils se sont l’un l’autre désarçonnés.
Il n’est pas de tigresse en la vallée de Galgopheye[1]
quand on lui a volé son petit tout jeune,
aussi cruelle pour le chasseur qu’est Arcite
par jalousie de cœur pour ce Palamon ;
ni dans Belmarie[2] il n’est lion si féroce
quand il est traqué, ou affolé de faim,
ni qui tant désire le sang de sa proie
que Palamon le meurtre de son ennemi Arcite.
Les coups haineux mordent sur leurs heaumes ;
le sang coule sur leurs deux flancs rougis.
Avec le temps finirent tous exploits,
car avant que le soleil fût à son coucher,
le fort roi Émetreus empoigna
Palamon comme il luttait avec Arcite,
et fit mordre son épée profondément en sa chair ;
et par la force de vingt hommes il est pris
sans se rendre, et entraîné au poteau ;
et, venant à la rescousse de Palamon,
le fort roi Ligurge est jeté à terre ;
et le roi Émetreus malgré toute sa force
est enlevé de sa selle d’une longueur d’épée,
si fort le frappa Palamon avant d’être pris ;
mais tout en vain ; il fut emmené au poteau.
Son cœur vaillant ne pouvait l’aider ;
il devait demeurer, alors qu’il était pris,
par force et aussi par composition.
Qui est malheureux maintenant sinon le dolent Palamon
qui ne doit plus retourner au combat ?
Et quand Thésée eut vu ce spectacle,
aux gens qui ainsi combattaient entre eux
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