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PRÉFACE.

monosyllabe, qui de tous temps a grisé tant de monde et est destiné à en griser encore tant, per omnia sœcula sœculorum :


Moi.

Rien n’est beau que le “ Moi," Le “Moi” seul est aimable !
C’est un mot ravissant, c’est un mot adorable !
En trois lettres il dit plus que tout l’alphabet,
Le “Tu,” le “Vous," le “ Leur," il les occit tout net.
Lorsque nous disons “ Moi !’’ s’agrandit notre bouche,
Tant le beau du sujet, et nous charme et nous touche :
“ Moi !… des mots c’est le Roi ! car ma pensée à Moi,
C’est mon bien, mon joujou, mon bijou, mon émoi.
Pour ce qui m’intéresse, oh ! je suis bon apôtre,
Mais je me ris pas mal ou du “ Leur ” ou du “ Vôtre ! "
Je suis Moi ! rien que Moi ! — Moi vaut bien mieux que Toi !
Aussi m’accoquiné-je à “ Moi,” toujours à “ Moi ! ”
Peut-être direz-vous que c’est de l’Egoïsme ;
Ne pense comme Vous, pour Moi, c’est Héroïsme ;
Donc du qu’en dira-t-on me moque, et je dis Moi :
“ Vive Moi ! vive Moi ! vive Moi ! vive Moi !'
“ Moi” ça vaut, voyez-vous, tous les “Vous” de ce monde :
C’est mon idée à “ Moi ” — honni soit qui la fronde !


Après cette profession de foi, crânement faite, me croirez-vous encore, Petite Voix, apte à écrire une préface honnête, et pas trop personnelle ? ”

— “ Dame ! avisez-y.”

— “ Oh ! par ma foi, non ! Il ne faut pas tenter le diable ; j’aime mieux, en guise de préface, narrer au lecteur un petit conte que je trouve se promenant dans les œuvres de mon féal et ami collaborateur, Madame de Châtelain. Je traduis donc Tony the Sleepless, m’engageant à dire au lecteur le pourquoi de se narré… au bout du conte.”

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. . . . .

Il y avait une fois un chasseur qui vivait dans une belle et antique forêt, asile impénétrable de gibier de toute espèce, si bien qu’en vendant la peau des bêtes qui tombaient sous ses coups, et en se nourissant de leur chair