Page:Chateaubriand - Voyage en Italie, édition 1921.djvu/137

Cette page n’a pas encore été corrigée

droits : quelques feuilles du laurier du tombeau de Virgile. " Tenet nunc Parthenope. " Il y a longtemps que j’aurais dû vous parler de cette terre classique, faite pour intéresser un génie tel que le vôtre ; mais diverses raisons m’en ont empêché. Cependant je ne veux pas quitter Rome sans vous dire au moins quelques mots de cette ville fameuse. Nous étions convenus que je vous écrirais au hasard et sans suite tout ce que je penserais de l’Italie, comme je vous disais autrefois l’impression que faisaient sur mon cœur les solitudes du Nouveau Monde. Sans autre préambule, je vais donc essayer de vous peindre les dehors de Rome, ses campagnes et ses ruines.

Vous avez lu tout ce qu’on a écrit sur ce sujet ; mais je ne sais si les voyageurs vous ont donné une idée bien juste du tableau que présente la Campagne de Rome. Figurez-vous quelque chose de la désolation de Tyr et de Babylone, dont parle l’Écriture ; un silence et une solitude aussi vastes que le bruit et le tumulte des hommes qui se pressaient jadis sur ce sol. On croit y entendre retentir cette malédiction du prophète : Venient tibi duo haec subito in die una : sterilitas et viduitas[1]. Vous apercevez çà et là quelques bouts de voies romaines dans des lieux où il ne passe plus personne, quelques traces desséchées

  1. « Deux choses te viendront à la fois dans un seul jour : stérilité et veuvage. » Isaïe.