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tombant du haut du cône au fond du cratère, mugissent dans mes vêtements ou sifflent dans mon bâton ; j’entends aussi rouler quelques pierres que mon guide fait fuir sous ses pas en gravissant les cendres. Un écho confus, semblable au frémissement du métal ou du verre, prolonge le bruit de la chute, et puis tout se tait. Comparez ce silence de mort aux détonations épouvantables qui ébranlaient ces mêmes lieux lorsque le volcan vomissait le feu de ses entrailles et couvrait la terre de ténèbres.

On peut faire ici des réflexions philosophiques et prendre en pitié les choses humaines. Qu’est-ce en effet que ces révolutions si fameuses des empires auprès des accidents de la nature qui changent la face de la terre et des mers ? Heureux du moins si les hommes n’employaient pas à se tourmenter mutuellement le peu de jours qu’ils ont à passer ensemble ! Le Vésuve n’a pas ouvert une seule fois ses abîmes pour dévorer les cités, que ses fureurs n’aient surpris les peuples au milieu du sang et des larmes. Quels sont les premiers signes de civilisation, les premières marques du passage des hommes que l’on a retrouvés sous les cendres éteintes du volcan ? Des instruments de supplice, des squelettes enchaînés.

Les temps varient, et les destinées humaines ont la même inconstance. La vie, dit la chanson grecque, fuit comme la roue d’un char.