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Colisée : sa grandeur et son silence à cette même clarté.

Saint-Pierre : effet de la lune sur son dôme, sur le Vatican, sur l’obélisque, sur les deux fontaines, sur la colonnade circulaire.

Une jeune femme me demande l’aumône : sa tête est enveloppée dans son jupon relevé ; la poverina ressemble à une madone : elle a bien choisi le temps et le lieu. Si j’étais Raphael, je ferais un tableau. Le Romain demande parce qu’il meurt de faim ; il n’importune pas si on le refuse ; comme ses ancêtres, il ne fait rien pour vivre : il faut que son sénat ou son prince le nourrisse.

Rome sommeille au milieu de ces ruines. Cet astre de la nuit, ce globe que l’on suppose un monde fini et dépeuplé, promène ses pâles solitudes au-dessus des solitudes de Rome ; il éclaire des rues sans habitants, des enclos, des places, des jardins où il ne passe personne, des monastères où l’on n’entend plus la voix des cénobites, des cloîtres qui sont aussi déserts que les portiques du Colisée.

Que se passait-il il y a dix-huit siècles à pareille heure et aux mêmes lieux ? Non seulement l’ancienne Italie n’est plus, mais l’Italie du moyen âge a disparu. Toutefois la trace de ces deux Italies est encore bien marquée à Rome : si la Rome moderne montre son Saint-Pierre et tous ses chefs-d’œuvre, la Rome