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MÉMOIRES D’OUTRE-TOMBE

elle m’aurait peut-être fait part si j’étais resté avec elle. Elle ne lâcha pas Bugeaud ; elle l’accommodait de toutes pièces : « Vous savez, me dit-elle, que je vous ai demandé quatre fois ? Bugeaud fit passer mes demandes à d’Argout. D’Argout répondit à Bugeaud qu’il était une bête, qu’il aurait dû refuser tout d’abord votre admission sur l’étiquette du sac : il est de bon goût, ce M. d’Argout. » Madame appuyait sur ces deux mots pour rimer, avec son accent italien.

Cependant le bruit de mon refus s’étant répandu inquiéta nos fidèles. Mademoiselle Lebeschu vint après le dîner me chapitrer dans ma chambre ; M. de Saint-Priest, homme d’esprit et de raison, me dépêcha d’abord M. Sala, puis il le remplaça et me pressa à son tour. « On avait fait partir M. de La Ferronnays à Hradschin, afin de lever les premières difficultés[1]. M. de Montbel était arrivé ; il était chargé d’aller à Rome lever le contrat de mariage rédigé en bonne et due forme, et qui était déposé entre les mains du cardinal Zurla.[2] »

« En supposant, a continué M. de Saint-Priest, que Charles X se refuse à l’acte de majorité, ne serait-il pas bon que Madame obtînt une déclaration de son fils ? Quelle devrait être cette déclaration ? — Une note fort courte, ai-je répondu, dans laquelle Henri protesterait contre l’usurpation de Philippe. »

  1. Sur la mission confiée par la duchesse de Berry au comte Auguste de la Ferronnays et sur le voyage de ce dernier à Prague (août et septembre 1833), voir le récit de M. de la Ferronnays, publié par le Marquis Costa de Beauregard dans le Correspondant du 25 janvier 1899.
  2. Voir l’Appendice No II : le Mariage morganatique de la duchesse de Berry.