gue m’aurait pu débarquer au Pont-Royal à Paris. Je ne suis pas l’ouvrage des siècles et des rois ; je n’ai ni le poids ni la durée de l’obélisque que le Nil envoie maintenant à la Seine ; pour remorquer ma galère, la ceinture de la Vestale du Tibre suffirait.
Le pont de la Moldau, bâti en bois en 795 par Mnata, fut, à diverses époques, refait en pierre. Tandis que je mesurais ce pont, Charles X cheminait sur le trottoir ; il portait sous le bras un parapluie ; son fils l’accompagnait comme un cicérone de louage. J’avais dit, dans le Conservateur, qu’on se mettrait à la fenêtre pour voir passer la monarchie : je la voyais passer sur le pont de Prague.
Dans les constructions qui composent Hradschin, on voit des salles historiques, des musées que tapissent les portraits restaurés et les armes fourbies des ducs et des rois de Bohême. Non loin des masses informes, se détache sur le ciel un joli bâtiment vêtu d’un des élégants portiques du cinquecinto : cette architecture a l’inconvénient d’être en désaccord avec le climat. Si l’on pouvait du moins, pendant les hivers de Bohême, mettre ces palais italiens en serre chaude avec les palmiers ? J’étais toujours préoccupé de l’idée du froid qu’ils devaient avoir la nuit.
Prague, souvent assiégé, pris et repris, nous est militairement connu par la bataille de son nom et par la retraite où se trouvait Vauvenargues. Les boulevards de la ville sont démolis. Les fossés du château, du côté de la haute plaine, forment une étroite et profonde entaille maintenant plantée de peupliers. À l’époque de la guerre de Trente Ans, ces fossés étaient remplis d’eau. Les protestants, ayant pénétré