coupa court à notre conversation, comme quand le marteau de l’horloge, en frappant dix heures, suspendait les pas de mon père dans la grande salle de Combourg.
Aimables enfants ! le vieux croisé vous a conté les aventures de la Palestine, mais non au foyer du château de la reine Blanche ! Pour vous trouver, il est venu heurter avec son bâton de palmier et ses sandales poudreuses au seuil glacé de l’étranger. Blondel a chanté en vain au pied de la tour des ducs d’Autriche : sa voix n’a pu vous rouvrir les chemins de la patrie. Jeunes proscrits, le voyageur aux terres lointaines vous a caché une partie de son histoire ; il ne vous a pas dit que, poète et prophète, il a traîné dans les forêts de la Floride et sur les montagnes de la Judée autant de désespérances, de tristesses et de passions, que vous avez d’espoir, de joie et d’innocence ; qu’il fut une journée où, comme Julien, il jeta son sang vers le ciel, sang dont le Dieu de miséricorde lui a conservé quelques gouttes pour racheter celles qu’il avait livrées au dieu de malédiction.
Le prince, emmené par son gouverneur, m’invita à sa leçon d’histoire, fixée au lundi suivant, onze heures du matin ; madame de Gontaut se retira avec Mademoiselle[1].
- ↑ La duchesse de Gontaut quitta Prague et rentra en France au mois d’avril 1834. Dans ses Mémoires (page 389), elle indique à peine les circonstances qui amenèrent son départ. Le marquis de Villeneuve, son neveu, et en même temps, à la petite cour de Prague, son plus ardent adversaire, entre au contraire, dans ses Souvenirs, en de longs détails à ce sujet. Rien de plus honorable pour Madame de Gontaut que ce témoignage d’un membre du contraire parti. « L’un des personnages les plus insignes