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MÉMOIRES D’OUTRE-TOMBE

reculer nos frontières jusqu’aux bords du Rhin. Nous pouvons tenir ce langage à Nicolas :

« Vos ennemis nous sollicitent ; nous préférons la paix à la guerre, nous désirons garder la neutralité. Mais enfin si vous ne pouvez vider vos différents avec la Porte que par les armes, si vous voulez aller à Constantinople, entrez avec les puissances chrétiennes dans un partage équitable de la Turquie européenne. Celles de ces puissances qui ne sont pas placées de manière à s’agrandir du côté de l’Orient recevront ailleurs des dédommagements. Nous, nous voulons avoir la ligne du Rhin, depuis Strasbourg jusqu’à Cologne. Telles sont nos justes prétentions. La Russie a un intérêt (votre frère Alexandre l’a dit) à ce que la France soit forte. Si vous consentez à cet arrangement et que les autres puissances s’y refusent, nous ne souffrirons pas qu’elles interviennent dans votre démêlé avec la Turquie. Si elles vous attaquent malgré nos remontrances, nous les combattrons avec vous, toujours aux mêmes conditions que nous venons d’exprimer. »

« Voilà ce qu’on peut dire à Nicolas. Jamais l’Autriche, jamais l’Angleterre ne nous donneront la limite du Rhin pour prix de notre alliance avec elles ; or, c’est pourtant là que tôt ou tard la France doit placer ses frontières, tant pour son honneur que pour sa sûreté.

« Une guerre avec l’Autriche et avec l’Angleterre a des espérances nombreuses de succès et peu de chances de revers. Il est d’abord des moyens de paralyser la Prusse, de la déterminer même à s’unir